• Le droit de réponse d'Edwy Plenel

     

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    Le droit de réponse d'Edwy Plenel

     

       Sarkozy-Kadhafi : nos infos, leur intox
    par Edwy Plenel


    http://img15.hostingpics.net/pics/617305Plenel.jpg« Diversion » (Nathalie Kosciusko-Morizet), « officine » (François Fillon), « infamie » (Nicolas Sarkozy) : le sarkozysme n’aime décidément pas l’indépendance des médias et le démontre encore une fois par ses réactions à nos nouvelles révélations sur ses secrets libyens. Comme en 2010 dans l’affaire Bettencourt, le pouvoir en place préfère insulter les journalistes dont les informations le dérangent plutôt que de répondre aux questions légitimes qu’elles posent. Mediapart ne retire rien de ses révélations, aussi légitimes que fiables. Mise au point en forme de rappel des principes démocratiques.

    La liberté de l’information fait partie des droits fondamentaux. Ce n’est pas un privilège des journalistes, mais un droit des citoyens : le droit de savoir tout ce qui est d’intérêt public afin de pouvoir se forger son opinion en toute liberté. Depuis la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 et son article 19, ce droit fondamental inclut celui « de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations par quelque moyen d’expression que ce soit ». De plus, il suppose le pluralisme des médias, principe dont la valeur constitutionnelle est reconnue, ainsi que l’indépendance des journalistes, garantie par leur statut professionnel.

    Les gouvernants des pays démocratiques sont supposés respecter ces principes dont, dans l’idéal, ils devraient être les premiers gardiens et les fidèles serviteurs. S’ils les bafouent, ce ne sont pas les journalistes qu’ils humilient mais la démocratie elle-même qu’ils méprisent. Ce simple rappel suffit à souligner l’absence de culture démocratique dont témoignent les réactions du pouvoir exécutif à nos nouvelles informations sur les secrets libyens de cette présidence finissante. Car accepter la liberté de la presse, c’est répondre aux questions des journalistes, et non pas insulter, discréditer et calomnier les journaux qui les posent.

    Est-il besoin de rappeler à messieurs Fillon et Sarkozy que Mediapart n’est pas une « officine » mais un journal, reconnu par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) ? Qu’il est animé par des journalistes professionnels, bénéficiant de la carte d’identité attribuée par la profession (CCIJP) ? Que son activité, son bilan et son actionnariat sont publics, détaillés, une fois l’an, par la publication détaillée de ses comptes ? Que des journalistes en sont les principaux actionnaires, l’ayant financé sur leurs économies avec la seule aide de citoyens attachés à la liberté de la presse, et que son équipe de salariés en défend farouchement l’indépendance ? Que les abonnements de ses lecteurs sont sa seule recette et la garantie de sa liberté, Mediapart n’ayant aucun autre revenu, ni publicité ni subvention ?

    S’il fallait une énième illustration de l’urgence d’une refondation démocratique de notre vie publique, elle est amplement fournie par ce nouvel épisode des relations tumultueuses de Mediapart, journal indépendant et participatif, avec une présidence de la République qui n’imagine le journalisme que dépendant et enrégimenté. Ce qu’elle ne supporte pas, ce ne sont pas seulement nos informations mais le fait de n’avoir aucune prise pour les entraver ou les étouffer, aucun relais complice, aucun
    moyen de pression. D’où ces campagnes délirantes, diffamatoires et calomnieuses, qui font semblant d’oublier ce que nous sommes alors même qu’ils sauront sans aucun doute s’en souvenir, demain, si d’aventure ils sont dans l’opposition : un journal libre, rigoureux et professionnel, totalement indépendant des pouvoirs, quels qu’ils soient, au service du seul public et de son légitime droit de savoir.


    Le puzzle des documents Takieddine

    Mediapart a mis en ligne et en accès libre depuis plusieurs semaines dix questions à Nicolas Sarkozy. Dix questions que nous avons évidemment transmises à son directeur de la communication, Franck Louvrier, et à ce jour toujours sans réponses. Dix questions que nous lui aurions posées en direct s’il avait accepté notre invitation à venir débattre en direct de son bilan avec notre rédaction, tout comme nous avons posé des « questions qui fâchent » à nos autres invités (Bayrou, Joly, Mélenchon et Hollande). Dix questions qui illustrent le travail d’enquête de Mediapart : des faits précis, recoupés et sourcés, sur lesquels nous voulions interpeller le président de la République sortant.

    Parmi ces dix questions, plusieurs concernent les investigations au long cours qui, de l’affaire Karachi aux documents Takieddine, nous ont conduits aux lourds secrets libyens de cette présidence. La dernière et dixième en résume l’enjeu de façon extrêmement simple et claire : « Selon des documents et témoignages réunis par Mediapart, des sommes importantes – jusqu’à 50 millions d’euros – auraient été versées en 2007 à votre entourage par le régime de Mouammar Kadhafi, ce que l’ancien dirigeant de la Libye, son fils Saïf Al-Islam et Abdallah Senoussi, l’ancien chef des services secrets libyens, avaient affirmé publiquement. Seriez-vous favorable à l’ouverture d’enquêtes judiciaires sur ces soupçons ? »

    Issu du cœur du régime déchu du colonel Kadhafi, de ses services de renseignement et du premier cercle du dictateur, le document libyen que nous avons récemment révélé est une pièce capitale dans un vaste puzzle que, pour Mediapart, Fabrice Arfi et Karl Laske se sont efforcés de reconstituer depuis l’été 2011. Les journalistes ont appris des historiens qu’un document ne vaut jamais seul : il n’est intelligible, vérifiable et exploitable, qu’à condition d’en connaître le contexte, les témoins et les acteurs. Or c’est ce que nous avons fait avec entêtement, prudence et méticulosité depuis dix mois, depuis ce jour de juillet 2011 où nous avons découvert et analysé plusieurs milliers d’autres documents, issus des archives personnelles de Ziad Takieddine.

    Intermédiaire de l’ombre, inconnu du public jusqu’à la révélation de son rôle constant dans les circuits financiers du sarkozysme depuis 1994-1995 et la campagne d’Edouard Balladur, ce Franco-Libanais est aujourd’hui au centre des investigations judiciaires des juges Renaud Van Ruymbeke et Roger Le Loire. La masse de documents révélés par Mediapart durant l’été 2011 est désormais entre leurs mains et leur exploitation par les enquêteurs, notamment sur les circuits financiers occultes utilisés à l’étranger, a conduit à l’ouverture d’un supplétif par le parquet de Paris, autorisant les deux juges d’instruction à enquêter sur des faits de blanchiment d’argent sur une longue période et jusqu’à nos jours.

    Outre l’homme-clé qu’est l’intermédiaire Ziad Takieddine, plusieurs proches, voire intimes, de Nicolas Sarkozy ont été mis en examen dans cette instruction depuis nos révélations : Nicolas Bazire, Thierry Gaubert et Renaud Donnedieu de Vabres. Des comptes off shore, des sociétés écrans, des investissements occultes, des fortunes dissimulées au fisc, des versements et sorties en argent liquide, etc., ont été mis au jour. Et c’est dans ce paysage déjà bien fourni que le volet libyen trouve sa place naturelle. Car les documents Takieddine font explicitement état de négociations secrètes avec la dictature libyenne dont des financements secrets étaient l’enjeu, dès les premiers contacts noués entre 2003 et 2005.

     Et jusqu’à leur découverte personne ne savait que, dès le début des années 2000, M. Sarkozy, alors ministre de l’intérieur, et ses plus proches collaborateurs, MM. Guéant et Hortefeux, s’étaient approchés, de façon systématique et   empressée, de l’entourage de Mouammar Kadhafi. Une relation intéressée dont le dévoilement éclairait d’un tout autre jour la réception fastueuse du dictateur libyen à Paris fin 2007, reconnaissance internationale inespérée pour Kadhafi, ainsi que le soudain zèle guerrier du chef de l’Etat français, en 2011, quand le surgissement des révolutions démocratiques arabes ouvrait la voie à des révélations aussi compromettantes qu’incontrôlées.


    Un faisceau concordant de soupçons

    Préparatoire à la première visite officielle de Nicolas Sarkozy à Tripoli, l’une des notes de Ziad Takieddine à Claude Guéant, datée du 6 septembre 2005, précise que certains pourparlers franco-libyens devraient « revêtir un caractère secret ». Car ce secret, ajoutait-elle, apportait cet « autre avantage : plus d’aise pour évoquer l’autre sujet important, de la manière la plus directe… ». D’autres notes révélées par Mediapart permettent de comprendre la nature de ce « sujet important », qualifié, guillemets d’euphémisme compris, ici de « sujet “sensible” », là de « volet “commercial” », ou là encore d’ « “assurance” de résultat » : l’argent.

     

    Dès 2003, M. Takieddine évoque ainsi un montage financier en énumérant « les décisions suivantes du patron », c’est-à-dire celles qu’il recommande à Nicolas Sarkozy qu’il appelle « le patron » ou « P » et dont il se présente comme l’exécutant. Parmi ces décisions, la création d’une « nouvelle structure complètement dépendante de son ministère » qui, ajoute-t-il, « sera capable de couvrir le sujet “sensible” par le biais de ses honoraires ». Ce sujet sensible, qui n’est autre que le versement de commissions, est évoqué dans d’autres notes destinées à l’entourage direct de Nicolas Sarkozy, en l’occurrence Brice Hortefeux et Claude Guéant, et dont l’enjeu est déjà libyen.

    Tel est le faisceau concordant de soupçons sur un financement totalement illicite, par un Etat étranger, qui plus est une dictature, de l’aventure politique de Nicolas Sarkozy dans lequel se sont inscrites nos investigations. Intermédiaires, témoins, protagonistes, etc. : depuis des mois, nous les cherchons, les rencontrons, les questionnons, que ce soit sur le versant français que du côté libyen. Avec des moyens qui ne sont évidemment pas ceux des Etats, de leur justice ou de leur police, nous avons cherché à savoir quelle était la réalité financière de cette lune de miel entre Nicolas Sarkozy et Mouammar Kadhafi.

    C’est ainsi que nous avons d’abord appris que, fin 2006, deux acteurs français de cette histoire avaient eu vent, voire été témoins, d’un accord entre les premiers cercles de collaborateurs de Nicolas Sarkozy et Mouammar Kadhafi sur un financement en vue de la campagne présidentielle de 2007. L’un est un ancien cadre de l’UMP versé dans la sécurité privée, l’autre un chirurgien ami de l’actuel secrétaire général de l’UMP, Jean-François Copé, qui avait recommandé ses services à Ziad Takieddine dont il était très proche. Titrées sur Mediapart « Kadhafi aurait financé Sarkozy », ces premières révélations n’ont donné lieu à aucune réponse sérieuse, à part un « grotesque » présidentiel sur TF1 en direct, ni démenti crédible ou poursuite en diffamation.

    Et c’est en poursuivant nos recherches que nous avons fini par obtenir un document issu des services secrets de la dictature libyenne qui confirme cet accord financier pour « un montant d’une valeur de 50 millions d’euros ». L’apparence du document, le style de sa rédaction, son formalisme bureaucratique, sa précision chronologique : outre la crédibilité des sources libyennes qui le détenaient, tout concourt à attester de son authenticité. Mais, surtout, la révélation de ce document par Mediapart s’est accompagnée d’un témoignage aussi inédit qu’inattendu : celui de Ziad Takieddine.

    Proche de Kadhafi, protégé de Sarkozy

    Ziad Takieddine n’est aucunement un ami de Mediapart, dont il n’a guère goûté les révélations qui ont contribué à le mettre dans l’embarras devant la justice française et devant l’administration fiscale, puisque nous avons aussi révélé qu’il ne payait pas d’impôts malgré son immense fortune. Il n’avait pas mâché ses mots quand, refusant de répondre à nos questions en août 2011, il nous avait lancé : « Je suis un homme propre et vous êtes sale. Vous êtes une des saletés les plus performantes dans la saleté ». Enfin, nous avons été amenés à porter plainte contre des menaces de mort visant Fabrice Arfi, proférées par un personnage évoluant dans les milieux du renseignement et dans les cercles du pouvoir sarkozyste, Pierre Sellier, à qui il est arrivé de travailler pour Ziad Takieddine (voir ici).

    Or, malgré ce contexte conflictuel, il n’a pas récusé le document libyen qu’il a découvert quand nous le lui avons montré, dans l’après-midi du vendredi 27 avril au cabinet parisien de ses avocats. Bien que ce document le mentionne, et donc le compromet en cas d’investigations judiciaires, il en a confirmé l’authenticité et a attesté de la crédibilité de son contenu, tout en prenant la précaution d’affirmer qu’il n’était pas présent à la réunion évoquée où aurait été validé l’accord de financement franco-libyen. Mieux, outre ses propres déclarations, l’une de ses avocates, Maître Samia Maktouf, nous a fait formellement savoir, par courriel, que son client « pense que ce document est crédible, vu la date et les personnes qui apparaissent dans ce document outre lui-même ».

    Depuis la publication de notre article, l’avocat d’un autre protagoniste de cette affaire d’Etat s’est exprimé, Maître Pierre Haïk, dont on a ainsi appris à la fois qu’il assurait la défense de Bachir Saleh et que son client résidait bien en France, comme l’avait affirmé Le Canard enchaîné. Car Bachir Saleh, destinataire du document libyen en tant que responsable du fonds d’investissement souverain du régime kadhafiste et surtout l’un des plus proches collaborateurs du dictateur, dont il dirigeait le cabinet, est très recherché, notamment par Interpol selon l’hebdomadaire satirique. Or il n’en bénéficierait pas moins d’un titre de séjour, ainsi que sa famille, et d’une protection policière, accordés par le ministre de l’intérieur, Claude Guéant, peu connu d’ordinaire pour sa mansuétude à l’égard des délinquants étrangers…

    Bref, homme clé du régime de Kadhafi, M. Saleh est aujourd’hui protégé par le pouvoir de Sarkozy. Nous nous attendions donc à son démenti. Diffusée par son avocat et quelque peu tardive, puisque nous l’avions évidemment sollicitée avant la publication de notre enquête, sa réaction ne va pas jusqu’à affirmer que notre document serait un faux. Bachir Saleh s’en tient à un démenti du contenu, associé à des réserves : « Bachir Saleh émet au préalable les plus expresses réserves sur l’authenticité de la note publiée par Mediapart et opportunément présentée comme constituant la preuve d’un financement de la campagne 2007 de Nicolas Sarkozy. En toute hypothèse, il affirme n’avoir jamais été le destinataire d’un tel document et dément catégoriquement avoir participé à une réunion le 6 octobre 2006 au cours de laquelle un accord aurait été conclu en vue de déterminer les modalités d’un soutien financier à la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy. Ces allégations, à visée politicienne, sont dénuées de tout fondement. »

    Les journalistes ne sont pas des juges, mais des « chiens de garde » de la démocratie, ainsi que les définit la Cour européenne des droits de l’homme : ils signalent, alertent, lancent des alarmes, mettent sur la table des faits dont la démocratie, ses institutions et ses responsables peuvent se saisir. Notre enquête réunit des indices graves et concordants d’un financement libyen de Nicolas Sarkozy, sous le règne du colonel Kadhafi : des documents, des témoignages, des dates, des voyages, des rencontres, etc. Dans une démocratie normale, il reviendrait automatiquement et rapidement à des juges indépendants de faire la lumière sur ces faits, avec des moyens que nous n’avons pas, ni techniquement ni légalement. Le lourd soupçon d’un financement par un Etat étranger d’un chef d’Etat, pour des montants incommensurables correspondant aux dépenses autorisées pour deux campagnes présidentielles, ne peut être balayé par de simples démentis. Encore moins par des calomnies.

    « C'est celui qui dit qui y est »

    Déjà, à l’été 2010, une campagne d’une extrême violence avait été lancée depuis l’Elysée contre Mediapart, orchestrée par Claude Guéant alors secrétaire général de la présidence : tandis que tout était fait, avec l’aide d’un procureur aux ordres, celui de Nanterre, pour étouffer judiciairement nos révélations sur l’affaire Bettencourt, l’entourage présidentiel dénonçait dans les médias nos supposées « méthodes fascistes ». Alors secrétaire général de l’UMP, Xavier Bertrand, devenu depuis ministre du travail, menait l’assaut, ce qui lui a valu une plainte en diffamation de Mediapart. Selon les habituelles lenteurs de notre justice, le procès n’aura lieu que début 2013. Entre-temps, les juges bordelais qui, finalement, instruisent l’affaire Bettencourt ont largement établi la pertinence de nos informations.

    « Officine » avait déjà été l’un des éléments de vocabulaire repris en boucle par les aveugles soutiens de la présidence. Cette fois, c’est le premier ministre François Fillon, que l’on a connu plus mesuré, qui s’y colle. Non sans imprudence. Bien qu’Eva Joly ait un jour aimablement qualifié Mediapart de « médicament pour la démocratie », il est peu probable que le mot soit ici employé au sens de « laboratoire d'une pharmacie où l'on préparait les médicaments ». Sans doute s’agit-il plutôt de son deuxième sens : « endroit où se prépare quelque chose secrètement, où l’on trame quelque chose ». Or s’il y eut bien des manœuvres secrètes, surveillances et intrusions, téléphoniques notamment, il faut plutôt les chercher du côté du pouvoir et de sa direction centrale du renseignement intérieur, confondue depuis 2010 pour son espionnage des journalistes et de leurs sources (lire nos articles sur l'espionnage qui a visé Mediapart).

    L’autre argument de circonstance, repris par la porte-parole du candidat Sarkozy, Nathalie Kosciusko-Morizet, puis par le candidat lui-même, est de nous accuser d’avoir organisé une diversion pour le compte d’un Parti socialiste qu’aurait embarrassé la brusque incursion de Dominique Strauss-Kahn dans la campagne. L’argument est d’autant moins fondé que Mediapart n’a jamais épousé l’emballement de la plupart des médias sur DSK, son bilan au FMI ou sa candidature éventuelle. De fait, nous fûmes parmi les rares à alerter très tôt sur les risques pris, pour la France et son image, par… Nicolas Sarkozy en soutenant sa nomination à la tête de l’institution financière mondiale. Quant au socialiste Julien Dray, qui a contribué à une lamentable mise en scène de ce retour strauss-kahnien, il est bien placé pour savoir que Mediapart ne rechigne pas à enquêter sur des faits qui embarrassent des personnalités socialistes.

    Mediapart, nos lecteurs les plus fidèles le savent bien, n’a pas de calendrier électoral. Son agenda est uniquement journalistique : révéler tout ce qui est d’intérêt public. Nous enquêtons de longue date, nous cherchons de nouveaux faits et nous les publions quand ils sont prêts à l’être, selon les règles professionnelles de notre métier – sourcer, recouper, vérifier, contextualiser, expliquer, etc. En revanche, si diversion il y eut ces derniers jours, elle est à chercher du côté de ceux qui ont relayé le faux événement Strauss-Kahn, transformant un entretien britannique en embarras politique pour François Hollande, pourtant le seul candidat socialiste, avec Arnaud Montebourg, totalement déterminé à combattre l’éventuelle candidature de DSK à la primaire socialiste. Auraient-ils oublié que Nicolas Sarkozy s’était vanté d’avoir propulsé Strauss-Kahn à Washington au point de s’autoproclamer DRH du Parti socialiste ?

    Reste le troisième mot de cette contre-attaque, langagière plutôt qu’informative, tant les faits sur lesquels reposent nos enquêtes sont superbement ignorés par le pouvoir présidentiel qu’ils ébranlent : infamie, donc. Infamie, c’est le mot employé par Nicolas Sarkozy dans un entretien télévisé, et ce n’est pas rien, si l’on en croit les dictionnaires : « flétrissure imprimée à l’honneur, à la réputation, soit par la loi, soit par l’opinion publique ; caractère déshonorant, honteux, vil, d’une chose, d’un acte ; action déshonorante, honteuse. » Mais l’infamie ne serait-ce pas plutôt d’avoir pactisé avec un dictateur, d’avoir entretenu des relations affairistes avec son entourage, d’avoir accepté des financements occultes d’un Etat étranger, d’avoir organisé une diplomatie parallèle dont l’argent était la finalité, d’avoir mené une guerre dont on ne peut plus exclure qu’elle ait eu une dimension préventive de protection d’intérêts privés, etc. ?

    Et l’infamie, ne serait-ce pas d’avoir mené ces compromissions et ces corruptions en secret du peuple français alors même qu’on lui désignait l’étranger en bouc émissaire, et surtout l’étranger musulman, arabe, berbère ou maghrébin ? C’est-à-dire l’étranger qui, parmi nous, témoigne de ces peuples que les dictateurs avec lesquels ce pouvoir frayait opprimaient et dépouillaient, les privant de leur liberté et de leur richesse ? Telle est sans doute l’imposture la plus criante que met à nu notre enquête : celle d’un pouvoir compromis avec des dictatures arabes et musulmanes, alors même qu’il faisait de l’islamophobie et de la xénophobie son fonds de commerce au détriment de nos compatriotes de culture ou de foi musulmane.

    « C’est celui qui dit qui y est », ont coutume de dire les enfants dans leurs jeux plus vrais que les simagrées adultes. Ce qui revient à rappeler que l’injure insulte d’abord son auteur. Diversion, officine, infamie : nous retournons volontiers à ceux qui, au mépris de la liberté de la presse, nous ont adressés ces trois mots, et l'indignité qui les accompagne.
     

    Lundi 30 avril 2012
    Source : Papy Mouzeot, Médiapart
    « Fête des travailleursSarkozy a porté plainte ! »

  • Commentaires

    1
    Mardi 1er Mai 2012 à 11:59
    cafardages

    ils sont vraiment aux abois les sous-hommes du Président !

    2
    Mardi 1er Mai 2012 à 14:09
    Adam

    Quand viendra la curée, ils vont se manger entre eux ..............afin de préparer 2017

    Bon 1er mai les Cafards !

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